Les Utopies Concretes - Esprit




Utopies plurielles

mardi 8 octobre 2002, par Jacques Fauvier


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Dans quel monde voulons-nous vivre ?
Quelle est cette société désirable dont nous parlons, résultat de la mise en oeuvre effective de ces utopies concrètes ?

S’il est un exercice risqué, c’est bien celui-là : on sait que les descriptions de « sociétés idéales » font en général plutôt froid dans le dos ! Et les passages de films montrant le bonheur sont le plus souvent d’une consternante niaiserie.

Pourtant, que vaut une action dont l’objectif n’est pas clairement défini ? Il est troublant d’observer que dans notre société, y compris dans les milieux alternatifs, la description détaillée du type que l’on désire, est quasiment toujours absente. Il est donc indispensable de se livrer à cette aventure prospective, tout compte fait fascinante.

Mais il faut indiquer immédiatement que si nous sommes partisans d’une utopie non-totalitaire, ce n’est pas pour imposer un modèle unique de société ! Les idées qui suivent sont donc à prendre comme des indications, destinées essentiellement à susciter créativité et désir d’innover. De surcroît les systèmes proposés seront pluriels parce que la mutation sociétale sera graduelle, et que coexisteront des lieux et regroupements de multiples orientations. Il sera loisible à chacun d’interpréter cette diversité comme une progressivité ou comme différentes voies d’expérimentation.

 Habitat

 petites entités humaines (quelques dizaines ou centaines d’habitats) dans un environnement naturel.
Autre solution : cité écologique plus importante sur un vaste espace.
 habitat relativement dispersé (espace naturel entre les constructions) avec une habitation par personne ou par groupe relationnel.
Egalement solution mixte avec structures individuelles et structures collectives reliées ou à proximité.
 formes variables avec une tendance vers les structures courbes ou circulaires, (de taille basse). Prédominance de la simplicité (et de la fonctionnalité).
 Matériaux écologiques, c’est-à-dire naturels et non-polluants. Prédominance du bois, de la terre crue, paille, chanvre, chaux et solutions mixtes. Le cas échéant et pour partie brique et pierre.
Autre solution : matériaux de récupération (si possible écologiques).
 énergies renouvelables permettant une autonomie énergétique totale :
 solaire actif (capteurs solaires pour chauffage, eau chaude, électricité) et passif (baies vitrées et vérandas orientées au sud, murs « trombe », récupérateurs de chaleur…)
 air : éoliennes pour électricité etc.
 bois : chauffage par poêles, inserts, qui peuvent être extrêmement performants.
 Autres sources d’énergies : biomasse (chauffage), eau etc.

 systèmes de recyclage :
 lagunage, avec des plantes adaptées pour retraitement des eaux usées.
 Toilettes sèches à composter : (seule) solution écologique pour le retraitement des déchets humains et animaux, fournissant pour le compostage une énergie précieuse pour l’agriculture.
 Récupération des eaux de pluie sur les toits des bâtiments.

 Autre solution : réhabilitation progressive des villages ou villes existants, aménagées dans un sens de plus en plus écologique, en particulier pour les systèmes d’énergie, de transport et de recyclage.

Ces différentes suggestions peuvent trouver leur première réalisation au sein d’écovillages ou une écocité.

 Fonctionnement économique.

 au stade ultime : absence de propriété (hormis pour les effets personnels), tâches collectives et individuelles effectuées librement par chacun selon ses goûts et orientations. Partage et responsabilisation. Polyvalence des individus grâce à la formation permanente et mutuelle, tant intellectuelle, que manuelle et technique.

 Solution intermédiaire : systèmes mixtes. Monnaie classique (notamment pour les échanges extérieurs, entre les écovillages et les autres entités) et monnaies alternatives, systèmes d’échanges locaux, pour les relations internes ou locales (à quelle échelle ?), coexistence de systèmes comptables (monnaies et échanges) et d’une économie directe et informelle (partage spontané, mise en commun).

 Utilisation des apports technologiques sous réserve qu’ils soient non-polluants (sur les plans chimiques, sonore, magnétique etc.). Ecotechnologies, efficaces et adaptées, dans les différents secteurs de l’activité humaine. Exemple : véhicules non-polluants (diverses énergies possibles, notamment l’eau...).

 Agriculture et alimentation biologiques. Tendance vers la permaculture (agriculture respectueuse des cycles, équilibres et compatibilités des écosystèmes).

Tendance à réduire voire supprimer l’exploitation animale (végétarisme ou végétalisme).
Coopération voire communication avec les êtres des autres règnes (animal, végétal), considérés non comme des choses, mais comme des êtres dotés d’une sensibilité.

 production des biens nécessaires à la vie humaine par des moyens non-polluants et non aliénants, de préférence locaux. Artisanat ou industrie écologie et éthique, gérée collectivement (autogestion).

 disparition progressive de la dualité travail/loisir, chacun s’accomplissant dans les activités qu’il choisit, obtenant ainsi plaisir, estime de soi et expérience, et apportant sa contribution au fonctionnement collectif.

Bien sûr, il reste à faire la description indicative d’une région ou d’un pays dans son fonctionnement économique, ses échanges, la production par écotechnologies, les transports, les sciences ; notamment, l’organisation d’une journée de travail avec la répartition des tâches…

 Structures sociales et relationnelles.

 relations librement établies et vécues par les individus. Cohabitation de structures traditionnelles (couples hétéros ou homos, familles) et de relations fluides, sans formalisation ni contractualisation (amour libre, familles choisies…).
 Education non-oppressive, fondée sur le dialogue et l’écoute de l’enfant, favorisant autonomie et créativité. Ecoles alternatives de diverses tendances.
Enfants en contact avec plusieurs femmes et hommes de différentes générations, cultures, opinions, et non avec les seuls parents, afin d’éviter l’effet névrogène de la famille nucléaire.
Absence d’autorité supérieure toute-puissante (patriarcale ou matriarcale). Communication et respect du libre-vouloir de chacun.

 Démocratie directe. Tendance à l’unanimité à la fois pour les décisions prises au plan local et pour les décisions engageant plusieurs collectivités au plan régional. Il est entendu que l’unanimité est un processus obéissant à des règles de fonctionnement précises, expérimenté depuis longtemps par certains groupes. Délégation fondée sur la valeur personnelle et non (obligatoirement) l’appartenance à un parti ou à un mouvement.
Présidences et responsabilités tournantes et non hégémoniques, ayant pour fonction essentielle l’écoute et la conciliation.

 Système intermédiaire mixte : respect du droit national ou supra-national en vigueur, et mise en place de règles ou décisions locales. Cela permettant de créer des « zones spécifiques », où seraient expérimentées différentes façons de vivre.

 Structures collectives variées : échange et mise en commun de biens (outils, matériels ménager, bureautiques, livres, locaux…) et de services ou activités (travaux agricoles, puériculture, construction, fêtes, développement personnel et éducation, arts…).

 Accomplissement personnel, culturel et spirituel (des individus).

 Fondement des données précédemment énoncées.
Le fonctionnement social décrit donne les moyens à chacun de se réaliser dans les domaines et de la manière qui lui conviennent. Inversement l’accomplissement personnel rend le contexte collectif plus aisé, fluide et harmonieux.

 Priorité mise à l’accomplissement personnel de chaque membre de la collectivité. Ceci signifie déterminer et accomplir librement ses choix de vie, découvrir ses valeurs et sa philosophie personnelles, développer à son rythme sa sagesse et sa conscience.
(Différence avec la société actuelle où la priorité est l’accumulation de richesses, et les sociétés du passé où la priorité est la soumission à des systèmes de dogmes et à des prescriptions rituelles).

 Les moyens mis en œuvre pour l’accomplissement personnel de chacun, pourront recourir à l’ensemble de la palette des méthodes connues (ou à créer) d’exploration intérieure et de connaissance de soi :
 techniques psychothérapeutiques et de développement personnel,
 pratiques spirituelles d’éveil et de libération,
 enseignements philosophiques multiples,
 activités artistiques, sensorielles et corporelles,
 développement de l’intuition et des facultés parapsychologiques,
 et bien sûr, la sensualité, les différentes formes de sexualités, les relations interpersonnelles…

Toutes ces disciplines et approches peuvent être d’ores et déjà abordées au sein de la société actuelle. La différence réside dans le primat de l’accomplissement personnel au lieu du primat donné à l’enrichissement et à la fonction sociale.

Auteur(s)
Jacques Fauvier

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